Jean-Paul Céré
Maître de conférences à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour
Président de l’Association Française de droit pénal
Président du Comité international des Pénalistes Francophones

Deux arrêts de principe, rendus le même jour, apportent de précieuses indications sur les conditions de recevabilité des réclamations contre une amende forfaitaire majorée qui concernaient des infractions à la circulation routière. il convenait de savoir si un prévenu est recevable à saisir la juridiction de proximité d’un incident contentieux quand il est confronté à une décision d’irrecevabilité de sa réclamation prise par l’officier du ministère public, alors qu’il soutenait ne pas avoir reçu l’avis d’amende forfaitaire majoré ? Ces arrêts importants s’inscrivent dans une reconnaissance jurisprudentielle d’un droit à bénéficier d’un recours réel et effectif dans le cadre de la procédure d’amende forfaitaire amorcée ces dernières années par la cour de cassation et le conseil constitutionnel. Ce droit à bénéficier d’un recours étant içi largement amplifié.

Quand l’officier du ministère public rejette une réclamation contre une amende forfaitaire majorée au motif que le prévenu n’avait pas joint l’avis d’amende forfaitaire majorée, quand bien même l’intéressé spécifiait qu’il ne pouvait le joindre car il ne l’avait pas reçu, une interprétation littérale de l’article 530-2 ne permet pas de soulever un incident contentieux. En jugeant que la requête en incident contentieux est désormais recevable bien que le contrevenant n’ait pas joint l’avis d’amende forfaitaire majorée à sa réclamation, en prétextant « que l’avis ne lui a pas été envoyé », la chambre criminelle impose au ministère public d’apporter la preuve de cet envoi. Dans un attendu de principe, elle considère « qu’il appartient au juge, pour prononcer sur la recevabilité de la réclamation adressée à l’officier du ministère public, de vérifier si la preuve de l’envoi est rapportée par le ministère public ». Dans la première affaire, le ministère public n’avait aucunement justifié de cet envoi et la messe était donc dite. Dans la seconde, le ministère public avait versé au dossier des bordereaux collectifs d’envoi d’amendes forfaitaires majorées. Cette production n’est pas jugée comme suffisante pour retenir que la preuve de l’envoi des avis relatifs aux amendes en cause au contrevenant.

 

Lire l’arrêt 1

Lire l’arrêt 2

Pour aller plus loin :
AJ Pénal 2016, p. 378, note Jean-Paul Céré

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Professeur à l’Université de Poitiers

Décidément, la responsabilité pénale des personnes morales est un sujet à la mode devant la chambre criminelle de la Cour de cassation. Mais alors qu’une très grande partie de la jurisprudence à propos de l’article 121-2 du code pénal porte sur la condition que l’infraction ait été commise pour le compte des personnes morales « par leurs organes ou représentants », cet arrêt du 30 janvier 2013, bien que non publié, se détache en ce qu’il porte sur un point moins discuté et pourtant sujet à discussion : la responsabilité pénale des personnes morales de droit public.
Mis en cause dans une affaire d’infractions à la législation sur les jeux et de blanchiment, un établissement public (le syndicat mixte de promotion de l’activité transmanche) pose une question prioritaire de constitutionnalité relative notamment à la conformité au principe de légalité de l’article 121-2 du code pénal.
La chambre criminelle de la Cour de cassation refuse de transmettre la question au Conseil constitutionnel au motif que « la question posée ne présente pas, à l’évidence, un caractère sérieux dès lors que les termes de l’article 121-2 du code pénal, dont le seul objet est de définir les conditions dans lesquelles la responsabilité pénale des personnes morales de droit public peut être engagée, à l’exception de celle de l’Etat, sont suffisamment clairs et précis pour que son interprétation, qui entre dans l’office du juge pénal, puisse se faire sans risque d’arbitraire et sans méconnaître aucun des principes constitutionnels précités ». La solution n’est guère étonnante au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation sur l’article 121-2, mais on peut critiquer le fait que la Cour ait balayé aussi rapidement l’argument d’imprécision des « activités susceptibles de faire l’objet de conventions de délégation de service public ».

>> Lire l’arrêt…[/fusion_text][/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

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Professeur à Aix-Marseille Université
Doyen de la Faculté de droit et de science politique d’Aix-Marseille
Avocat au Barreau de Marseille

L’assemblée plénière de la Cour de cassation a rendu, le 7 novembre 2014, un arrêt d’une importance considérable. Suite à la découverte de huit infanticides remontant à plus de dix ans, elle a jugé que « si, selon l’article 7 alinéa 1er du Code de procédure pénale, l’action publique se prescrit à compter du jour où le crime a été commis, la prescription est suspendue en cas d’obstacle insurmontable à l’exercice des poursuites ». La Cour précise encore que « tel est le cas des infractions de meurtres par ascendant sur mineurs (infanticides) dès lors que les grossesses de Mme X, masquées par son obésité, ne pouvaient être décelées par ses proches ni par les médecins consultés pour d’autres motifs médicaux, que les accouchements ont eu lieu sans témoin, que les naissances n’ont pas été déclarées à l’état civil, et que les cadavres des nouveau-nés sont restés cachés jusqu’à la découverte fortuite des deux premiers corps, de sorte que nul n’a été en mesure de s’inquiéter de la disparition d’enfants nés clandestinement, morts dans l’anonymat et dont aucun indice apparent n’avait révélé l’existence ».
Revenant sur la solution rendue par la Chambre criminelle du 16 octobre 2013 rendue dans la même affaire (Cass. Crim., 16 octobre 2013, n° 13-85232 et 11-89002, D. 2013, p. 2673, note Y. Mayaud, RJPF 2014-1/28, obs. E. Gallardo), l’assemblée plénière consacre ici, même de manière circonstanciée, la règle contra non valentem. Mais la Cour de cassation ne va pas jusqu’à reconnaître un principe général lié à la seule dissimulation, comme en matière d’infractions clandestines…

 

Lire l’arrêt…

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H. MATSOUPOULOU

Professeur de droit privé à la faculté de droit Jean Monnet de l’Université Paris Sud 11,
Directrice de l’IEJ

 

La gravité des faits commis en connaissance de cause par les prévenus, qui avaient utilisé les biens des sociétés qu’ils dirigeaient pour financer leurs besoins personnels, justifie le prononcé de la peine complémentaire d’interdiction de gérer, administrer ou contrôler une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale.

Le moyen, nouveau et mélangé de fait et, comme tel, irrecevable, en ce qu’il invoque pour la première fois devant la Cour de cassation le caractère disproportionné de l’atteinte spécifique portée au droit de l’intéressée au respect de sa vie privée et familiale par la mesure d’interdiction de gérer prononcée par le tribunal correctionnel et confirmée par la cour d’appel, en violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, doit être écarté.

 

Lire l’arrêt…

 

 

 

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Maître de conférences à l’université de Pau
Secrétaire adjointe de l’AFDP

Le 1er octobre 2014, plusieurs dispositions de la loi n° 2014-896 du 15 août 2014 sont entrées en vigueur, dont celles modifiant la rédaction du 2nd alinéa de l’article 122-1 du Code pénal, relatif à l’altération du discernement. Depuis lors, le nouvel alinéa est ainsi rédigé : « La personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable. Toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime. Si est encourue une peine privative de liberté, celle-ci est réduite du tiers ou, en cas de crime puni de la réclusion criminelle ou de la détention criminelle à perpétuité, est ramenée à trente ans. La juridiction peut toutefois, par une décision spécialement motivée en matière correctionnelle, décider de ne pas appliquer cette diminution de peine. Lorsque, après avis médical, la juridiction considère que la nature du trouble le justifie, elle s’assure que la peine prononcée permette que le condamné fasse l’objet de soins adaptés à son état ». Si la première phrase demeure inchangée, le législateur a en revanche fait œuvre de précision en prévoyant, désormais, une réduction du tiers de la peine encourue par les personnes dont le discernement était altéré au moment des faits.
Confrontée à l’application temporelle de cette nouvelle disposition, la chambre criminelle affirme sans ambiguïté que le nouvel alinéa 2nd de l’article 122-1 du Code pénal est une disposition plus favorable dont le prévenu doit bénéficier.
En l’espèce, le 8 juillet 2014, soit avant l’adoption de la loi du 15 août, le prévenu avait été condamné pour violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours, soit 90 jours, par conjoint, avec usage d’une arme et avec préméditation. Tout en écartant la thèse du tir accidentel, mais en retenant tout de même l’altération du discernement en raison, notamment, du contexte dépressif dans lequel se trouvait le prévenu, la cour d’appel avait prononcé à son encontre une peine de six ans d’emprisonnement. Au moment où la chambre criminelle a dû se prononcer sur le pourvoi formé par le prévenu, la peine maximale encourue, compte tenu des nouvelles dispositions issues de la loi du 15 août, était en principe de six ans et huit mois d’emprisonnement, soit une peine supérieure à celle prononcée par la cour d’appel. Mais la Cour de cassation a tout de même annulé l’arrêt, affirmant que le prévenu devait bénéficier des dispositions plus favorables du nouvel alinéa 2nd de l’article 122-1.
Cette solution s’explique aisément au regard des dispositions en cause. Il ne fait aucun doute que la nouvelle rédaction du 2nd alinéa de l’article 122-1 du Code pénal est bien évidemment plus douce, plus favorable au prévenu, que l’ancienne loi. En effet, l’ancienne rédaction laissait au juge une grande latitude dans la détermination de la peine, puisque aucune réduction de peine n’était légalement fixée. Il pouvait donc aisément prononcer une peine privative de liberté supérieure aux deux tiers de la peine encourue. Or, désormais, en matière correctionnelle, une telle peine ne peut être prononcée que si le juge motive spécialement sa décision de ne pas appliquer la diminution de peine.

Lire l’arrêt…

Pour aller plus loin:

JCP G 2015, 1209, note V. Peltier ; RPDP 2015, n°4, obs. L. Grégoire

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S’agissant de la responsabilité civile du prévenu, les préjudices financiers invoqués par les associés et les salariés sont rejetés, en raison de leur caractère indirect. Toutefois, le tribunal correctionnel retient le préjudice moral invoqué par certains salariés de la banque, qui découlerait « des conditions de travail délétères que ces employés ont éprouvées à la suite de la révélation des faits, du retentissement, sur l’ensemble du personnel, de l’atteinte à l’image de la banque ». Ce préjudice ne semble pourtant être que la conséquence du préjudice directement souffert par la banque. Enfin, il peut paraître étonnant que la banque ait obtenu la réparation intégrale de son préjudice alors que des négligences avérées et renouvelées ont pu lui être imputées.
Frédéric Stasiak
Professeur à l’Université de Nancy II

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Pour aller plus loin :
Revue de sciences criminelles, 2011, p. 126, obs. F. Stasiak[/fusion_text][/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

H. MATSOUPOULOU

Professeur de droit privé à la faculté de droit Jean Monet de l’Université Paris sud 11

 

Lorsqu’ils constatent la matérialité d’une infraction non intentionnelle susceptible d’être imputée à une personne morale, il appartient aux juges d’identifier, au besoin en  ordonnant un supplément d’information, celui des organes ou représentants de cette personne dont la faute est à l’origine du dommage.

Qu’il en va ainsi du représentant légal qui omet de veiller lui-même à la stricte et constante mise en œuvre des dispositions édictées par le code du travail et les règlements pris pour son application en vue d’assurer la sécurité des travailleurs, à moins que ne soit apportée la preuve qu’il a délégué ses pouvoirs à un préposé investi par lui et pourvu de la compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires au respect des dispositions en vigueur.

 

Lire l’arrêt…